Le fil conducteur du sujet de notre recherche, "La liberté de l'homme dans la pensée de Karol Wojtyla/Jean-Paul II", est le problème de l'articulation de la triade " vérité, bien, liberté". Ce problème posé par l'encyclique "Veritatis Splendor", dont Jean-Paul II fut le signataire en 1991, serait lié à une certaine négation ou un rejet du corps comme faisant partie de l'expérience de la liberté de l'homme au profit d'une liberté exclusivement spirituelle. Selon cette conception, le corps est "un matériau brut" sans aucun lien avec l'expression de la liberté de l'homme. Notre tentative sera de revenir sur la question concernant l'expression de la liberté dans le contexte actuel qui n'a pas cessé d'être influencé par la conception de la liberté héritée des Lumières et cela parfois au détriment de la liberté conçue à la fois et inséparablement comme spirituelle et corporelle. Et donc par-delà toute conception dualiste et séparatiste de l'homme ( deux substances séparées comme l'avait dit Descartes). S'appuyant sur le réalisme d'Aristote et de saint Thomas d'Aquin, Karol Wojtyla/Jean-Paul II, s'est engagé à défendre la liberté de l'homme-personne à travers ses écrits et sa vie. Nous essaierons d'expliquer l'apport de sa pensée sur le sujet de la liberté (I); puis le témoignage personnel qu'il donna à l'humanité à travers son expérience propre de la liberté ( II); enfin nous tenterons d'approfondir l'approche de la notion de liberté chez le philosophe et théologien polonais ( III). En ce dernier point, nous essaierons notamment de montrer que l'expérience de la liberté va au-delà de la double expérience "du fait quelque chose se passe en l'homme" et "du fait l'homme agit" ainsi que le pense rigoureusement notre auteur dans "Personne et acte". Notre première thèse à ce propos est : en plus du pâtir et de l'agir de l'homme , il existe une expérience, celle d'un phénomène qui échappe à la fois à la passion et à l'action. Le second point de cette dernière partie consistera à montrer que notre auteur aurait pu penser davantage ce que nous appelons " la temporalité de la liberté". En effet, le rapport de la liberté avec le temps n'affleure pas clairement dans ses écrits, du moins pas dans son oeuvre magistrale anthropologique consacrée à l'expérience totale de l'homme. Or, il n'y a pas de liberté en dehors du temps ( compris au sens phénoménologique et même au sens théologique). Telle est notre deuxième thèse qui se veut être une esquisse de réponse au problème de l'eschatologie en crise dans l'expérience chrétienne de la vie quotidienne aujourd'hui. La crise de la conception de la liberté n'est pas dans une certaines mesure une crise la foi en l'éternité ? Si l'homme tend à se faire l'étalon de sa liberté, c'est peut-être parce qu'il refuse de vivre authentiquement dans une articulation conséquente du présent, du passé, et de l'avenir, comme le dirait Heidegger. Il nous semble donc opportun de penser phénoménologiquement la temporalité de la vie chrétienne en lien avec la notion de liberté et celle d'éternité. Par le truchement de la phénoménologie héritée de Husserl, le penseur chrétien catholique pourrait être à même de rejoindre les partisans de la liberté purement spirituelle sur leur propre terrain. Cette rencontre pourrait lui permettre de révéler le vrai sens de la liberté en empruntant le langage de ceux qui pensent autrement que lui pour l'appliquer à la foi du chrétien aux fins dernières et à sa Relation au Christ Libérateur qui reviendra au jour de la libération définitive restaurer la dignité des âmes qui auront vécu de manière authentique, dans le temps kairologique de la foi: celui de la parousie.