La lutte contre la pauvreté: l'exemple d'associations dans la production alimentaire en France et en Inde

Nom: 
PERRIN
Prénom: 
Antoine
Type de soutenance: 
Doctorale
Directeur(s) de thèse: 
Anne SALMON
Date de soutenance: 
31/12/18
Résumé: 

Après avoir examiné les indicateurs de mesure de la pauvreté, j’ai mobilisé nombre d’auteurs afin de tenter de la définir : en sociologie avec Robert Castel et Serge Paugam, en Histoire avec Paul Bairoch et Bronislaw Geremek, en économie avec Amartya Sen et Thomas PikettyGrâce à ces débats théoriques, j’ai ensuite fait une analyse des dispositifs publics de lutte contre la pauvreté mis en place aujourd’hui, mais aussi des dispositifs privés, notamment l’action des grandes entreprises et des initiatives regroupées sous le terme de social business, un terme popularisé par Muhammad Yunus, ces initiatives de social business sont aujourd’hui valorisées par l’Union Européenne et la Banque MondialeIl existe des différences entre ces dispositifs publics ou privés mais quelque chose semble les rapprocher : le traitement de la pauvreté reste un traitement assez exclusivement économiqueDans leurs ambitions et dans leurs pratiques ces dispositifs semblent se concevoir sur une même idée : l’intégration se résume à l’intégration économiqueL’intégration dans le marché devient une solution autour de laquelle le consensus se faitLa question qui m’apparait en face de ces dispositifs est la suivante : qu’en est-il de l’émancipation ? L’idée d’une émancipation par l’économique est-elle si simple que ça ?On doit se demander si l’intégration par le marché est potentiellement productrice de changements sociaux ou nonCette question a apporté une première clarification et conceptualisation dans l’approche des initiatives de lutte contre la pauvreté, conceptualisation j’ai l’intention de poursuivre dans mon travail de thèseD’autre part, de nombreux vocables sont mobilisés pour parler de la lutte contre la pauvreté, certains très nouveaux : innovation sociale, empowerment, participation citoyenne, exclusion, inclusion, inclusion activeGrâce à la notion d’émancipation, j’ai commencé à les mettre en rapport et à les questionnerUne piste nouvelle s’ouvre par rapport au traitement par le public ou le privé, avec les communsLa théorie des communs est une piste de réflexion récente développée par Elinor Ostrom, qui a pour cela reçu le prix de la banque de Suède pour le Nobel d’économie en 2009Cette définition repose sur la définition des communs comme une approche qui se différencie du public et du privéLes communs, c’est la rencontre de trois choses : une ressource exploitée par une communauté, des relations sociales qui se forment autour de cette ressource, et surtout la création de règles d’exploitation décidées collectivement, à voix égale pour chaque acteur de la communautéElle est perçue comme une voie prometteuse par un certain nombre d’acteurs : la Conférence des Nations unies sur le développement durable qu’on appelle conférence de Rio a pris les communs pour thème en 2012La recherche s’est emparée de cette théorie, avec des économistes comme Benjamin Coriat, des sociologues comme Christian Laval ou des philosophes comme Pierre Dardot : ce débat théorique sur les communs est actuellement en plein développementElle est également prise en compte, sur le terrain, par de nombreuses initiatives, notamment dans l’économie sociale et solidaire, afin que ces initiatives puissent rendre compte de leurs actionsL’approche par les communs est différente de l’approche par le marché, et repose sur une participation locale et continue des acteursJe propose de poursuivre mon travail en demandant en quoi la théorie des communs peut-elle enrichir la question de la lutte contre la pauvreté et de l’économie solidaire et sociale ?C’est un sujet nouveau pour la rechercheLa question des communs fournit-elle un analyseur pertinent d’initiatives diverses dans la forme et dans leur origine géographique et culturelle ?C’est pourquoi je propose la comparaison entre l’Inde et la FranceEn termes de méthodologie, les acteurs du débat autour des communs mettent en garde contre une recherche qui se ferait hors-solAfin d’apporter une réponse à la question que je pose, il me semble donc pertinent de l’ancrer dans des cas empiriquesC’est pourquoi je vais procéder par études de casEn sélectionnant, dans un premier temps, parmi les initiatives que je connais en Inde deux initiatives sur la base d’une étude de terrain de six moisLe réseau KVK autour d’Ahmedabad et le centre d’agriculture paysanne de Wardha, qui sont des associations qui regroupent agriculteurs, travailleurs associatifs et chercheurs : ces acteurs veulent développer ensemble une agriculture qui permette de vivre, mais veulent aussi mettre en place des pratiques respectueuses de leur environnement social et écologique, local et globalLa recherche empirique se poursuivra en France, pendant six mois, au cours desquels je suivrai deux initiatives qui posent cette question de l’alimentation et de la lutte contre la pauvreté : le réseau Stan AMAP à Nancy, et l’association des jardins étudiants de Rouen qui travaillent sur des parcelles de terre au cœur de la ville et tiennent une épicerie solidaireIl m’a semblé que, compte tenu des enjeux fondamentaux de la question de l’alimentation, cruciale en Inde et en France, je vais me concentrer sur des expériences relatives à la production et à la distribution des alimentsConcrètement, la recherche se fera par la passation d’entretiens avec les participants à ces initiatives, mais aussi par l’observation participante, afin de voir au jour le jour quelles pratiques se développentL’enjeu de cette recherche est d’observer dans les pratiques internes et externes de ces initiatives la place de l’émancipationEn interne les acteurs qui évoquent les communs parlent de participation, de règles claires modifiables par tous et à tout moment, comment cela se déroule-t-il dans les faits ?En externe ces pratiques entraînent-elles une transformation qui dépasse leur simple existence ? Si oui, je voudrais savoir si cette transformation est factrice d’émancipation au-delà des participants ? 

Date début de thèse: 
10/15