Manger ou ne pas manger, quelle est l’émotion ? Corps, culture matérielle et émotions en situation

Alors qu’il combattait son dégoût premier, C. Lévi-Strauss (1953/1993) se délecta de la douce saveur des koro, tandis que P. Stoller et C. Olkes (1990) faisaient les frais du courroux d’une femme de famille songhaï (Niger) en se voyant servir une sauce insipide. L’ethnographie est cette expérience émotionnelle vécue dans la rencontre, certes avec l’autre humain, mais aussi entre un corps et des matières à incorporer. A partir de deux enquêtes, l’une réalisée auprès d’adolescents[i] et l’autre auprès de sportifs de haut niveau[ii], nous proposons d’aborder : les matières en jeu dans l’action de manger et les émotions provoquées ; les conséquences émotionnelles de l’acte alimentaire sur le sujet lui-même considérant que c’est en mangeant que l’on devient mangeur ; les conséquences des relations entre sujets et objets sur l’environnement émotionnel global des sujets. Nous espérons aussi, à travers la prise en compte des émotions, enrichir nos analyses du couplage sujet-objet.[i]Les données sur les adolescents sont issues d’AlimAdos, recherche financée par l’ANR (appel d’offre PNRA 2007). Y sont associés des chercheurs du laboratoire Cultures et Sociétés en Europe (Strasbourg) et du laboratoire Anthropologie-Adaptabilité Biologique et Culturelles (Marseille).[ii]L’essentiel des données repose sur le travail de thèse de M. Hilpron consacré au judo de compétition (UFR STAPS, Orléans).